La polémique qui entoure Nathalie de Saint-Cricq ravive une vieille question : celle d’un entre-soi journalistique et familial qui protège, qui pardonne, et qui autorise parfois des dérapages impossibles ailleurs. Issue du clan Duhamel–Castéra, mêlant journalistes d’influence, hauts fonctionnaires et ministres , Saint-Cricq évolue depuis toujours dans un environnement feutré, presque imperméable aux secousses extérieures.
C’est lors d’un échange avec Alexis Corbière que tout s’embrase. Alors que le député rappelle la gravité de l’antisémitisme, la journaliste rétorque : « le vote des musulmans aussi », laissant entendre que LFI instrumentaliserait le sujet pour séduire un électorat ciblé. L’amalgame met le feu aux poudres. LFI saisit l’Arcom, bientôt suivie par Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris, dénonçant des propos « extrêmement graves ».
Pourtant, Nathalie de Saint-Cricq n’est pas née d’hier. Petite-fille de Jean Meunier, résistant et fondateur de la Nouvelle République du Centre Ouest , fille et sœur d’hommes de presse, elle a toujours évolué dans les couloirs où s’écrit — et s’échange — le pouvoir médiatique. Son parcours l’amène ensuite à croiser celui de Patrice Duhamel, son futur mari, puis d’Alain Duhamel, son beau-frère, figures tutélaires du paysage politique télévisé. Leur fils Benjamin Duhamel, lui aussi, perpétue la tradition familiale dans les médias.
Dans ce cercle, les alliances restent soignées : la famille Castéra, Publicis, puis Amélie Oudéa-Castéra, ministre éclair dans plusieurs gouvernements. Un monde où les passerelles entre journalisme, haute fonction publique et pouvoir politique semblent naturelles, presque évidentes.
Nathalie de Saint-Cricq gravit les échelons : cheffe du service politique de France 2 lors du débat Macron–Le Pen, où elle est violemment critiquée pour sa non-intervention, collaboratrice de Léa Salamé, puis, en 2025, directrice des rédactions nationales de France Télévisions. Un parcours solide, prestigieux, mais aussi très protégé — suffisamment, sans doute, pour expliquer la désinvolture de certains propos.
Au-delà du cas Saint-Cricq, cette affaire rouvre la question d’un paysage médiatique français fracturé : un secteur public perçu comme trop proche du pouvoir, un secteur privé dominé par quelques milliardaires, et une liberté de la presse qui ressemble parfois à une élégante illusion.
L’Arcom tranchera. Mais une chose demeure : l’impression d’une neutralité journalistique de plus en plus fragile, et d’une confiance qui s’effrite face à l’arrogance supposée de celles et ceux qui se pensent inattaquables.
A suivre donc.

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