Au confluent du Nil Blanc et du Nil Bleu, les pyramides et temples du royaume kouchite, grande puissance du monde antique ( VIIIe siècle av. J.-C. au IVe siècle apr. J.-C. ) ne semblent plus à l’abri de la guerre qui ravage le Soudan. Depuis avril 2023, il y a un conflit majeur entre l’armée régulière soudanaise (SAF) et les Forces de soutien rapide (RSF), une milice paramilitaire.
Jusqu’en Juillet 2011, le Soudan était le plus vaste pays d’Afrique. Mais la sécession du Soudan du Sud a redessiné les frontières. A l’Ouest du pays, le Darfour est depuis 2003 le théâtre d’un conflit sanglant entre rebelles et forces gouvernementales. Depuis 2023, les rebelles ou Forces de Soutien Rapides, issus des anciennes milices janjawids, dont le chef est Mohamed Hamdan Daglo, dit Hemetti, livrent une guerre totale pour le contrôle du pays.
Après 500 jours de siège, El Fasher, la capitale du Nord-Darfour est tombée aux mains des RSF. Les Nations-Unies parlent de massacres, exécutions à caractère ethnique, viols collectifs, enlèvements contre rançon, disparitions d’enfants. 100 000 personnes ont déjà fui la ville, s’joutant aux 12 millions de déplacés que compte le Soudan. Depuis Novembre, la famine est officiellement installée dans la ville. Idem pour Kadugli (Kordofan du Sud). L’aide internationale ne peut arriver à destination. Beaucoup d’infrastructures (hôpitaux, écoles) sont hors d’usage.
L’Egypte, qui a colonisé le Soudan au XIXe s, est en faveur des forces en présence ne voulant pas de grabuges à ses frontières. Officiellement l’Arabie Saoudite, la Turquie et l’Iran aussi. Mais les RSF ont reçu des armes et des drones des Emirats Arabes Unis. Les États-Unis, avec des pays arabes comme l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Égypte, ont proposé une trêve humanitaire. Les RSF semblent lui donner leur accord. Pourquoi tous ces mouvements?
Le Soudan est l’un des premiers producteurs d’or d’Afrique. Le 24 mai 2023, la principale raffinerie d’or du Soudan est à son tour tombée aux mains des RSF, ce qui constituerait un pactole de 150,5 millions de dollars. L’or est l’un des principaux moyens de financement des milices. Ils pillent systématiquement les banques et les maisons. L’extraction illégale se fait sans contrôle sanitaire ou écologique avec des procédés au cyanure et à la thiourée. Mais peu importe, l’argent n’a pas d’odeur. L’or non plus et l’Egypte dont les caisses sont vides et a besoin de refaire ses réserves commence à s’y intéresser. D’où certainement la tentative de médiation.
Mais l’or n’est pas la seule richesse de ce pays. Le Manganèse, cuivre, zinc, chrome, fer sont sous utilisés mais très présents. C’est aussi une terre très fertile et l’une des meilleures terres arables du continent, notamment dans la Gezira. Ils fabriquent 70% de la gomme arabique mondiale, qui est utilisée dans l’agroalimentaire (émulsifiant) et le vin, les boissons gazeuses ( empêchant la cristallisation du sucre), les cosmétiques, l’industrie. Elle est nettement moins chère que celle du Sénégal et l’Europe est le premier consommateur de gomme arabique soudanaise avec 40% de la consommation mondiale.
Enfin Port Soudan, chef lieu de l’Etat de la Mer Rouge, est un port stratégique. Devenue capitale par effondrement de Khartoum, toutes les ambassades s’y sont réfugiées ainsi que les ONG. Créé par les Britanniques en 1905, entouré de récifs coralliens, cette ville est importante du fait de sa situation géographique, son port pétrolier, et son autoroute. Les RSF se rapprochent de la ville et risquent de tomber.
C’est pourquoi les puissances se rapprochent et tentent de négocier avant que tout ne s’écroule. Il y a trop d’intérêts en jeu.
A suivre donc.
https://unric.org/fr/crise-au-soudan-la-reponse-de-lonu/
https://whc.unesco.org/fr/actualites/2648/
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